Dans un arrêt rendu par la cour d’Appel de Montpellier le 15 décembre 2022 (Cas Montpellier, 15-12-2022- n°22/01411), une maison subissait des désordres. La commune dans laquelle était situé l’immeuble faisait l’objet d’un arrêté de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle en raison de mouvements différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols.
Suite à cette publication les propriétaires du bien procédaient à une déclaration auprès de leur assurance.
L’assurance diligentait alors un cabinet d’expert qui lui-même sollicitait un bureau d’étude technique. Ce bureau établissait un plan de repérage, définissait et orientait des mesures de réparation et consultait des entreprises. Les travaux de reprises étaient ensuite effectués sur la base des travaux du Bureau d’études techniques.
Quelques années plus tard d’importants dommages réapparaissaient.
Les propriétaires du bien sollicitaient la désignation d’un expert judiciaire.
Ce dernier mettait en exergue une insuffisance des travaux conçus par le Bureau technique. En effet le bureau d’étude avait préconisé une reprise en sous œuvre partielle au lieu d'une reprise globale des bâtiments.
Pour l’expert, la cause des nouveaux désordres n’était pas l’existence de nouveaux mouvements consécutifs à la sécheresse mais résidait dans la conception des travaux par le bureau d’étude technique.
Le montant des travaux de reprise était évalué à 592.628,40 €. Le préjudice total des propriétaires étaient évalués à plus 650.000 € (frais de maitrise, d’œuvre de déménagement, de relogement…)
Se fondant sur le rapport d’expertise les propriétaires de la maison sollicitaient en référé la condamnation du bureau d’étude technique. Il convient de rappeler que la procédure de référé est une procédure d’urgence qui permet au Président du Tribunal judiciaire de prendre des mesures provisoires. Il est notamment possible de solliciter en référé le versement d’une provision. L’article 835 alinéa 2 du Code de procédure civile dispose ainsi « Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, (Le Président du Tribunal peut accorder) une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire. ».
Le Président du tribunal faisait droit à la demande de provision. Cette décision était confirmée en appel.
Les juges ont estimé que la responsabilité du Bureau d’étude technique pouvait être retenue soit sur le fondement de la garantie décennale, s’il s’avérait que le Bureau d’étude s’était vu confier une mission de maitrise d’œuvre, soit sur le fondement de la responsabilité délictuelle (faute dans la conception des travaux).
L’existence de l’obligation n’apparait dès lors pas sérieusement contestable pour les juges, puisque la responsabilité du bureau d’études, au regard d’éléments factuels, pouvaient être retenue sur deux fondements différents (décennale ou délictuelle).
Un bureau d’étude technique, qui a préconisé des travaux de reprises et de renfoncement après une période de sécheresse, peut voir sa responsabilité engagée s’il s’avère que ces travaux sont insuffisants.